Livre
d'Osée (chapitre 8 versets 4 à 7 et 11 à 13.)
Les
fils d'Israël ont établi des rois sans me consulter, ils ont nommé des
princes sans mon accord ;
avec leur argent et leur
or, ils se sont fabriqué des idoles. Ils seront anéantis. Je le rejette,
ton veau d'or, Samarie ! Ma colère s'est enflammée contre tes enfants.
Refuseront-ils toujours de retrouver l'innocence ? Ce veau est l'œuvre
d'Israël, un artisan l'a fabriqué, ce n'est pas un dieu ; ce veau de
Samarie sera brisé en mille morceaux. Ils ont semé le vent, ils récolteront
la tempête. L'épi ne donnera pas de grain ; s'il y avait du grain, il ne
donnerait pas de farine, et, s'il en donnait, elle serait dévorée par
les étrangers. Éphraïm a multiplié les autels pour expier le péché ;
et ces autels ne lui servent qu'à pécher. J'ai beau lui mettre par écrit
toutes les prescriptions de ma loi, il n'y voit qu'une loi étrangère.
Ils offrent des sacrifices pour me plaire et ils en mangent la viande,
mais le Seigneur n'y prend pas de plaisir. Au contraire, il y trouve le
rappel de toutes leurs fautes, il fait le compte de leurs péchés. Qu'ils
retournent donc en Égypte !
Avec ce passage de la
Bible, nous sommes en plein dans l'Ancien Testament. Le prophète Osée
vivait dans les années 750 avant Jésus-Christ. Donc, bien avant la venue
de Jésus parmi les hommes. Il y a autant de temps entre la vie du prophète
et celle de Jésus qu'entre le roi Saint-Louis et nous : 750
ans…Autrement dit, le contexte, l'ambiance étaient totalement différents.
Osée nous met en présence d'un Dieu très répressif, en colère, avec
un profil de "père fouettard". Un Dieu qui fait peur et que
nous ne reconnaissons pas dans le Dieu d'amour qui nous habite. Et
pourtant c'est le même.
Il
faut dire que le prophète Osée lui-même a très mal vécu la trahison
de la femme qu'il aime et qui l'a trahi. Et, dans ses rapports avec Dieu
cela ne peut que transparaître. N'oublions pas que la Parole de Dieu
transmise par chacun des prophètes passe par le double filtre de
l'environnement social de chaque époque et de la situation personnelle de
chacun d'eux.
Ainsi,
dans ce passage Osée nous rapporte que Dieu ressent comme une terrible
trahison le comportement de son peuple. Un peuple qui se détourne de
l'essentiel - la Loi reçue par Moïse - pour se consacrer à l'idolâtrie
du veau d'or et autres divinités païennes. Un peuple qui perpétue les
sacrifices animaux et se vautre dans des orgies de toute nature. Pourtant,
c'est bien ce même Dieu qui avait libéré les Juifs de l'esclavage en
Egypte, le même qui les a sauvés avec la manne dans le désert, le même
qui les a amenés à la Terre promise. Et voilà ce peuple qui oublie son
Dieu pour se livrer à la débauche et au péché. Et tout cela chagrine
Osée au plus haut point car il y voit un acte de trahison. Une redoutable
épreuve que lui-même a connu. Et Dieu tempête et va jusqu'à menacer de
renvoyer son peuple en Egypte. Finalement, les Juifs ne retourneront pas
en esclavage en Egypte mais ils subiront l'exil à Babylone.
La
trahison ne fait pas partie en tant que telle de la liste des
commandements reçus par Moïse (le décalogue). Et pourtant, la plupart
des commandements ont un rapport avec la trahison : croire à d'autres
dieux c'est bien une trahison, voler c'est bien trahir son prochain,
mentir c'est bien trahir son interlocuteur, quant à l'adultère c'est
vraiment l'exemple, le modèle si on peut dire de la trahison. Alors,
pourquoi avoir tant de mal à supporter la trahison ? Osée l'a mal vécue
et Dieu aussi.
Mais
n'en est-il pas de même pour chacun de nous ? Il me semble que la
trahison fait mal, beaucoup de mal parce qu'elle porte atteinte à un
sentiment que partage Dieu et l'humanité : je veux parler de l'amour.
Ainsi, lorsque vous aimez quelqu'un et qu'il vous trahit c'est très
difficile à vivre. Le plus grand risque est de basculer de l'amour à la
haine. Un risque que nous devons surmonter en anéantissant la haine par
l'amour.
Cela
ne transparaît pas vraiment dans le texte d'Osée, et pourtant nous
savons qu'il a pardonné à sa femme et a repris sa vie avec elle. Nous
savons aussi, nous, ce que Osée ne pouvait pas savoir, c'est que Dieu
allait venir parmi les hommes, parmi son peuple si infidèle et se
sacrifier sur la Croix pour racheter l'humanité tout entière. Un acte
d'amour sublime et inimitable. Un acte, qui, d'une façon assez paradoxale
rend plus difficile la grâce d'avoir la foi. Je m'explique. Au temps d'Osée,
la foi consistait à croire en un seul Dieu en oubliant toutes les divinités
païennes qui exigeaient des sacrifices et qui consistait à respecter la
Loi. C'était déjà difficile puisque les Juifs répugnaient à en être
convaincus. Depuis Jésus, en plus de cette Loi reçue par Moïse nous
devons croire que Dieu est venu parmi les hommes. Tout le monde n'a pas la
sainteté de Saint-Pierre qui, à la question de Jésus qui demandait à
ses disciples : " Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je
?", St-Pierre qui répondit "Tu es le Messie, le Fils du Dieu
vivant !". St-Pierre, le premier croyant en quelque sorte, qui
pourtant trahira rapidement Jésus en le reniant trois fois. Toujours la
trahison !
Alors,
oublions le Dieu colérique du prophète Osée et rappelons-nous du Dieu
d'amour et de miséricorde qui est venu parmi nous. Ne le trahissons pas !
Oublions nos haines et nos égoismes pour nous consacrer au pardon, à
l'amour et à la miséricorde…
Charles
Durand
Le
Brûlé Saint-Denis, le 30 juin 2008 pour l'émission du 15 juillet..