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Charles Durand du Brûlé vous propose de lire ses courriers de lecteur...

 

Dons et dindons.

 

Nous sommes régulièrement sollicités pour apporter notre soutien "payant" à toute une série de causes plus nobles les unes que les autres. Téléthon par ci, journée contre ci, journée contre ça. Rares sont les semaines de l'année où nous ne sommes pas mis à contribution. Bien sûr, nous participons volontiers à toutes ces actions car leurs objectifs ne peuvent que nous émouvoir et toucher notre cœur.

Mais que notre bonne volonté ne nous empêche pas de réfléchir un peu au "système" qui s'est mis en place au fil du temps de façon insidieuse.

D'abord, il faut réaliser que ces actions nous permettent de nous donner bonne conscience en faisant la charité à bon compte. Passons sur la mesquinerie qui consiste à "jeter" aux pauvres les seules pièces jaunes qui encombrent nos goussets : on eut préféré que l'appel concerne des pièces blanches ou des billets.

Ces petits dons sont aussi, pour le citoyen, une façon de manifester son approbation pour les actions entreprises : il est vrai que la quasi-totalité de ces actions poursuivent des objectifs dont la noblesse est incontestable : cela facilite les choix ! C'est une sorte de vote, de plébiscite, payant qui plus est (un peu). Un des aspects de la démocratie en quelque sorte : nous votons en cotisant "pour que le monde aille mieux". Ceux qui organisent ces "votes" sans le savoir partent donc gagnants, même si avec le temps, la concurrence est plus vive dans le "caritatif" et les citoyens plus méfiants.

Ce qui est le plus gênant, c'est que les pouvoirs publics, théoriquement responsables de ces actions diverses et variées, se satisfont de cette situation qui leur permet peu à peu de s'en désengager. Il est vrai qu'on les voit mal nous solliciter sur la voie publique pour la construction d'un nouveau porte-avion nucléaire ou pour compléter les frais de bouche d'un édile municipal ! C'est bien plus simple d'en décider sans consulter personne ou presque. Alors, puisque les citoyens sont prêts à mettre la main à la poche pour la recherche sur le cancer, par exemple, pourquoi augmenter les dotations publiques ? Sauf que, du coup, les citoyens payent deux fois : un fois en versant leurs impôts et une autre fois par leurs dons volontaires. Or, tous les citoyens payent des impôts et pas seulement les redevables de l'impôt sur le revenu : au quotidien chacun d'entre nous, du plus riche au plus pauvre, apporte sa contribution à la TVA et à diverses taxes (octroi de mer, produits pétroliers, tabacs, cotisations sociales…). Il serait donc normal que les pouvoirs publics utilisent en priorité ces fonds pour des actions nobles. Il n'est pas normal que de nombreux acteurs des secteurs sociaux et de santé soient obligés, en plus du financement public, de faire appel aux dons volontaires en mettant en place des organisations qui absorbent une partie des dons alors que les pouvoirs publics ont déjà eux, leurs réseaux de collecte…payés par les contribuables.

Que faire ? Arrêter de participer aux dons ? Surtout pas ! Mais faisons pression sur les pouvoirs publics pour les mettre devant leurs responsabilités. En proposant, par exemple, que pour chaque euro collecté sous forme de don citoyen, l'organisme public défaillant cotise lui aussi un euro à la même cause. N'importe quel député peut proposer une telle mesure simple. Le financement ? Pas de problème : parcourez un rapport de la Cour des Comptes et vous verrez que le total des dons populaires est de loin, mais de très loin inférieur au total des gaspillages et détournements perpétrés par tous les organismes publics que nous finançons de nos deniers.

Alors, pour la prochaine collecte : pensez pièces blanches plutôt que jaunes ou mieux si le cœur vous en dit…mais que cela ne vous empêche pas de savoir que vous êtes les dindons consentants de la farce. Des dindons qui peuvent espérer que ce système pervers évolue en bien un jour prochain…

 

Charles Durand

(Saint-Denis)

 

 
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