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Charles Durand du Brûlé vous propose de lire ses courriers de lecteur...

 

Réunionnais : on se moque de nous !

 

           Les médias du 9 mars * (cf .ci-dessous, en fin de courrier  les extraits du Journal de l'île du 9 mars 2006) font état des résultats de l'enquête de séroprévalence du virus du chikungunya. Les experts affirment sans états d'âme que "c'est un outil largement utilisé qui nous permet d'avoir une bonne représentativité de la population adulte" (J.-P. Boutin) ou que "l'enquête ne repose pas sur une population représentative mais nous donne une estimation fiable" (P. Hervé). Cette dernière affirmation surréaliste est digne de figurer dans tous les manuels d'apprentis statisticiens pour illustrer la plus grossière manipulation statistique qui puisse être commise. L'enquête a été réalisée sur les prélèvements de sang de 567 femmes enceintes. Or, bon an, mal an, il y a un peu moins de 15 000 femmes enceintes dans l'île. Cet échantillon ne représente donc, au mieux, que ces 15 000 personnes. Or, près de 780 000 habitants peuplent le département, on est donc loin du compte. Près de 765 000 personnes ne sont pas représentées dans l'échantillon, soit 98% de la population, rien que ça !

           Qu'est-ce qui permet d'affirmer que la présence d'anticorps dans le sang est la même pour les femmes que pour les hommes ? Aucun prélèvement de sang de personnes de sexe masculin n'est dans l'échantillon. Pas plus que de jeunes, de personnes âgées, de femmes stériles ou de femmes non enceintes. Tirer des conclusions d'un échantillon qui porte sur une population qui elle-même ne représente que 2% de l'ensemble est aberrant : du jamais vu en statistique. En déduire et affirmer doctement que 80% de la population risque d'être contaminée est une tromperie énorme. En tous cas, cela n'a rien de scientifique et jette la suspicion sur tout ce qu'on nous "sert" comme chiffres sur l'épidémie.

            Au fait, par quelles méthodes "scientifiques" sont établies les statistiques de personnes atteintes par la maladie. La ou les méthodes de 2005 ? La ou les méthodes de 2006 ? On l'ignore totalement : c'est probablement trop compliqué à comprendre par nous autres, autochtones, ignares par définition…

            Après un Premier Ministre qui compare des données sous-estimées en 2005 avec des données rectifiées en 2006 pour démontrer une soi-disant explosion imprévisible, nous voici maintenant avec des échantillons non représentatifs, mais fiables !

            Mesdames et Messieurs les experts et autres dirigeants en tous genres vous perdez toute crédibilité en manipulant ainsi les informations de base. Je n'ose pas imaginer ce qu'il en est pour les autres données médicales, toxicologiques, entomologiques ou autres. Vous vous moquez des Réunionnais ! Après nous avoir menti pour nous rassurer, vous nous mentez pour nous faire peur. Arrêtez de nous prendre pour des enfants.

 

           Charles Durand

           statisticien en retraite

           Le Brûlé – Saint-Denis

Extraits du Journal de l'île du 9 mars 2006

ACTUALITÉ

 

 

SANTÉ
Explosion du nombre de décès directement liés au chikungunya
La Drass a rendu publique, hier, le dernier point sur la situation épidémiologique. Chiffres que nous avions déjà révélés le matin même dans le “Journal de l’île”. Au 26 février, la Cire fait état de 186 000 personnes contaminées et de 93 décès liés (pour 53) directement ou (pour 40) indirectement au chikungunya. Par rapport à la semaine précédemment étudiée, il y a 5 fois plus de personnes mortes directement du virus. Des données minimales, à prendre avec des pincettes, puisque toutes les personnes infectées par le virus durant la semaine d’étude n’ont pas encore été recensées. Alors que le nombre de cas estimés est en diminution ces dernières semaines, les autorités sanitaires restent prudentes avant d’annoncer que le pic de l’épidémie a été atteint. Les services des urgences enregistrent en effet une hausse inquiétante du nombre de passage pour chikungunya. Si les femmes sont dans l’ensemble plus touchées que les hommes, on retiendra que l’épidémie est particulièrement intense dans l’est (Bras-Panon, Salazie) et le sud-ouest (Saint-Leu, Les Avirons et l’Entre-Deux).

[4 mars 2006]

Évolution des symptômes

-  La nature des principaux symptômes et leur répartition sont stables depuis le début de l’épidémie (fièvre et arthralgies :100% des cas ; céphalées : 70 % ; myalgies : 60% et éruptions : 33 %). Cependant, la fréquence de survenue des myalgies (douleurs musculaires) semble en légère augmentation.
-  Concernant les formes dites “graves” associées au chikungunya, les signes cliniques prédominants sont les méningo-encéphalites (10), les autres atteintes neurologiques centrales (10), les hépatites aiguës sévères (5), les atteintes cutanées sévères (4), autres (15). Ces chiffres se réfèrent uniquement au cas biologiquement confirmés chez les patients âgés de plus de 28 jours admis en réanimation. Au total, 49 cas d’infection suspectée ou confirmée à chikungunya chez les nouveau-nés âgés de moins de 28 jours ont été signalés. Parmi ceux-ci, 40 cas étaient des infections materno-néonatales (survenue entre 0 et 9 jours après la naissance) dont 33 sont biologiquement confirmées.
-  En ce qui concerne les formes graves (biologiquement confirmés) d’infections materno-néonatales associées au chikungunya, le principal syndrome clinique observé est la méningo-encéphalite (10). Viennent ensuite les atteintes cutanées sévères (7), les syndromes algiques et troubles de l’alimentation (11), la septicémie (1), les troubles du rythme cardiaque (2) et la thrombopénie isolée (diminution du nombre de plaquettes sanguine) (2).

Prudence sur le pic

“La baisse observée depuis la semaine 5 (du 30 janvier au 5 février, ndlr) est à interpréter avec énormément de prudence. On ne peut vraiment pas dire que le pic est passé”, estime Jet de Valk, épidémiologiste à l’InVs. Si la courbe épidémique, établie sur la base des données du réseau sentinelle, montre une diminution du nombre de cas estimés entre la semaine 5 et la semaine 6 (entre le 31/01/06 et le 12/02/06), cette tendance ne pourra toutefois être confirmée qu’après consolidation des données des deux dernières semaines étudiées. Et même si plusieurs indicateurs sont à la baisse (nombre de cas signalés par les médecins de l’île ou arrêts de travail), il est difficile de se prononcer sur l’atteinte d’un éventuel pic avant 4 semaines consécutives de chute. Les autorités sanitaires sont d’autant plus prudentes sur l’interprétation d’une tendance que le nombre de passages dans les services d’urgence de tous les hôpitaux de l’île, observés la semaine 8 (du 20/02/06 au 26/02/06), a augmenté.

La BBC enquête à la Réunion

En même temps que le Premier ministre, les journalistes parisiens ont pris leurs jambes à leur cou en début de cette semaine. Après avoir fait leur B.A. de gratter sur notre maladie tropicale pendant une semaine, au contact des autochtones, les plumitifs s’en sont allés. Seul un envoyé spécial de Radio France se risque à rester dans notre zone infestée. Les journalistes étrangers semblent plus courageux (ou en retard ?). On compte en effet sur nos terres une équipe de la BBC venue enquêter sur le CHIK, une journaliste belge de “Le Soir” et un reporter Suisse.

Le nombre de morts directes explose

93. C’est le nombre de personnes qui sont mortes directement ou indirectement du chikungunya au 26 février. Un chiffre qui risque d’être revu à la hausse prochainement, en raison du décalage des remontées d’information. Sur ces 93 certificats de décès, on en compte 53 dans lesquels le chikungunya est mentionné comme cause initiale ou immédiate du décès, et 40 où il est fait état d’une co morbidité (cause associée). Le dernier point épidémiologique du 23 février rapportait 77 décès liés au virus, dont 10 pour lesquels aucune autre cause médicale que le chikungunya n’avait été retenue. Des décès directs dont le nombre avait alors doublé depuis le précédent point en date du 12 février. Cette fois, le chiffre est plus de 5 fois supérieur au dernier point épidémique. On passe en effet de 10 à 53 morts directes. Les décès sont survenus principalement dans les secteurs Est (35 victimes) et Sud de l’île (41). Au Nord, on enregistre 7 décès pour 10 sur la même période (depuis le 1er janvier 2006) dans l’Ouest.

Les femmes plus touchées que les hommes

-  Depuis le début janvier, les classes d’âge sont plus uniformément touchées qu’au cours des mois précédents.
-  A part chez les jeunes (entre 0 et 14 ans), où la différence n’est pas significative, on observe que le chikungunya atteint plus fréquemment les femmes que les hommes. L’exemple le plus flagrant se situe dans la tranche d’âge supérieure à 60 ans : 5 femmes sont touchées pour 4 hommes. Le sang des femmes serait-il meilleur que celui des hommes au goût des aedes albopictus ? Pas vraiment. Si à ce jour l’on ne dispose d’aucune explication scientifique sur le sujet, les spécialistes pensent que c’est certainement lié au fait que les femmes sont plus découvertes (au sens vestimentaire) et que le moustique a tendance à vivre autour des domiciles, sachant que les femmes sont plus présentes à la maison que les hommes. C’est là qu’on mesure l’intérêt du combat des femmes pour une égalité d’accès au travail...

Textes : Marie Payrard

 

 

 
 
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