Route
du littoral : il faut empêcher l’hécatombe !
Notre route du littoral est un
sujet inépuisable. Avec le recul, il faut bien reconnaître que nous
avons eu beaucoup de chance. Il est plus facile de trouver les six numéros
du loto que de risquer de mourir sous une chute de pierre sur la route du
littoral. Démonstration. Pour
être sûr de gagner au loto il faudrait remplir les 13.983.816
combinaisons possibles…Pour risquer de périr sous une chute de pierre,
le calcul des probabilités montre qu'il faudrait passer plus de
17.315.000 fois sur la route ! En effet, en 31 ans, de 1975 à 2005, plus
de 346.315.000 véhicules sont passés au pied de la falaise et 20
accidents mortels ont été causés par une roche. Vingt accidents de
trop, mais, en 31 ans, sur la même route, 60 accidents mortels ont été
causés par…l’imprudence des conducteurs. Les automobilistes sont donc
trois fois plus dangereux que la nature qu’on tente de
"domestiquer". Mais le hasard a bien fait les choses. Pas pour
ceux qui ont perdu un proche et pour qui ce fût un drame inguérissable
et qui ont droit à toute notre sympathie. Mais pour tous ceux qui ont échappé
à l'hécatombe annoncée. Je m'explique.
Les
accidents dus à des chutes de pierre ont eu lieu, jusqu'à présent, à
un moment où aucun véhicule n'était à l'arrêt sous la falaise. Hélas,
de plus en plus souvent de longues files de véhicules
"stationnent" au pied d'une falaise fragile. Que va-t-il se
passer si un pan de falaise s'écroule comme en mars dernier ? Outre les
dizaines de tués sous l'éboulis, la panique provoquera d'autres victimes
en grand nombre. L'ouverture, dans les prochains mois, de la route des
Tamarins, va amplifier le phénomène en permettant à de plus en plus de
véhicules de se précipiter vers le Nord de l'île.
Des
mesures simples et peu coûteuses sont possibles pour empêcher l'hécatombe.
Le principe consiste à considérer la route du littoral actuelle comme
une sorte de tunnel sans plafond. Un tunnel qui peut se refermer comme un
piège mortel pour ceux qui seront "dedans" quand le pan de
falaise s'écroulera. Depuis la catastrophe du Mont-Blanc, des mesures de
sécurité très strictes ont été mises en place dans les tunnels de
grande longueur. Il faut les appliquer au tunnel à ciel ouvert qu'est
notre route. En particulier, une régulation stricte du trafic doit empêcher
qu'un véhicule ne s'engage sur la route s'il y a le moindre obstacle à
sa libre circulation jusqu'à l'autre extrémité du "tuyau".
Concrètement, tant que des véhicules sont à l'arrêt à l'entrée de
St-Denis sous le tunnel, on doit empêcher l'accès à la route du côté
Possession. Mieux vaut attendre derrière des barrières de type
"passage à niveau" qu'au pied d'une falaise qui peut s'ébouler.
De même, il faut désormais proscrire absolument toute solution de type
"canal bichique", sans échappatoire possible, qui serait
interdite dans un tunnel. Tout dispositif qui aboutit à faire stationner
des véhicules au pied de la falaise est tout simplement criminel et je pèse
mes mots. Plus généralement, il faut s'inspirer de TOUTES les mesures de
sécurité drastiques appliqués dans les tunnels longs (1). En
particulier, il est urgent d'organiser des exercices de simulation d'évacuation
de la route en cas de chutes de pierres massives. Une bonne organisation
des secours (un plan Orsec spécifique) permettrait de sauver des vies. A
ma connaissance, il n'existe pas, mais je peux me tromper.
Oui,
nous avons eu beaucoup de chance ! Il se pourrait bien qu'en une fois –
demain ? la semaine prochaine ? – le nombre de tués depuis 31 ans
double ou triple en une minute. Les pouvoirs publics sont désormais prévenus.
N'attendons pas qu'il soit trop tard pour mettre en place ces mesures de
bon sens.
Charles
Durand
Le Brûlé
– Saint-Denis
(1)
voir le site internet de l'équipement www.cetu.equipement.gouv.fr
à la rubrique sécurité