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Charles Durand du Brûlé vous propose de lire ses courriers de lecteur...

 

Madame, cachez donc ce trou que je ne saurais voir !

 

C'est l'histoire d'une dame d'un certain âge. Elle vient d'avoir 60 ans. Née en octobre 1945, elle a la fâcheuse habitude d'exhiber son trou dans tous les médias. Habitude perverse et indécente. Vous avez compris qu'il s'agit de la Sécurité Sociale qui fait régulièrement la une de l'actualité à propos de son déficit, le fameux trou de la Sécu.

Cet acharnement à démontrer que la Sécu est en déficit est pour le moins suspect. L'Etat ne manque pas d'accuser les uns et les autres sans se sentir lui-même responsable. C'est bien connu : les professionnels de santé coûtent trop cher, les hôpitaux sont mal gérés, les industries pharmaceutiques et médicales font des bénéfices exorbitants et les malades sont trop malades. Sans compter les vieux qui vivent trop longtemps (parce qu'on les soigne trop bien, probablement !), les couples qui font trop d'enfants, etc, etc…L'Etat ne manque pas une occasion de nous rappeler que, décidément, toutes ces avancées sociales et de santé deviennent insupportables. La preuve : le "trou" de la Sécu devient un gouffre insondable. Une preuve qui n'en est pas une !

Avez-vous déjà entendu parlé du trou de l'Education nationale ? De celui de la Défense nationale ? Et de bien d'autres organismes qui gèrent les missions qui incombent à l'Etat ? A cette aune, seul le Trésor public n'a pas de déficit ! Seule la Sécu a son "trou". Certes, pour l'année 2004 le déficit des administrations de sécurité sociale ressort à 16 milliards, mais celui de l'ensemble des administrations publiques atteint 60 milliards sans qu'on dénonce les autres ministères responsables de ce gros trou.

Evidemment, vous me direz que la Sécu est financée par des cotisations et que le reste des dépenses publiques l'est par des impôts. C'est le résultat d'une situation historique qui concevait le risque maladie, le risque (sic) vieillesse, le risque (re-sic) maternité comme devant faire l'objet d'un dispositif d'assurance : les assurances sociales. Dispositif logique il a soixante ans, mais complètement dépassé en 2005.

La santé, les prestations sociales, les retraites sont du ressort de l'Etat et doivent être totalement intégrés dans le budget de la nation sans qu'on ait besoin de rechercher un équilibre comptable spécifique à ces fonctions. Au demeurant la règle normale des budgets publics est l'unicité du budget : l'ensemble des recettes est mis dans un pot commun qui permet de faire face à l'ensemble des dépenses sans que telle recette soit affectée à telle dépense. Dans le dispositif actuel de la Sécu, les transferts entre risques sont multiples et rendent la situation incompréhensible. Une seule chose est sûre : il y a un trou !

Un trou bien pratique car il permet de culpabiliser tous les acteurs sociaux et médicaux et de rogner sur les honoraires, les remboursements, les prestations, les retraites. Dans le même temps les loyers fastueux ou les frais de bouche de certains ne provoquent aucun "trou" visible , ils peuvent prospérer en toute impunité !

Un trou bien pratique aussi car il permet de prélever des cotisations dont certaines ne sont pas plafonnées : les pauvres payent pour les riches ! Du coup, la diminution de l'impôt sur le revenu apparaît d'autant plus scandaleuse que c'est le seul impôt de notre système de prélèvements qui permet de taxer les riches plus que les pauvres.

Ah, oui, décidément, Madame la Sécu, il est bien pratique pour l'Etat votre trou. Mais, un peu de décence à votre âge, ôtez-le de notre regard et n'en parlons plus.

 

Charles Durand

            Le Brûlé - Saint-Denis.

 

 
 
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