COURRIER DES LECTEURS
Contre le Sida, faire progresser vers plus
d’humanité
[1er décembre 2006]
Tout le monde, dans chacune de nos îles et partout, tous,
nous devons nous mobiliser contre le Sida. On ne joue pas avec cette
peste. En ce qui concerne le positionnement de l’Eglise catholique, nous
insistons d’abord sur le sens de la sexualité. Il est nécessaire de
redonner à la sexualité tout son sens comme langage privilégié pour un
amour humain à réussir dans la fidélité, la responsabilité et la vie
ouverte sur la vie. Nous affirmons cela de manière très forte, non
seulement au point de départ mais de manière permanente dans toutes nos
démarches touchant à l’amour humain. ... À nos yeux,
une banalisation de la sexualité se retournerait donc contre une
responsabilisation des personnes, des couples et de la société, non
seulement immédiatement mais surtout à moyen terme et à long terme. En
même temps, nous reconnaissons que notre société est dans une situation
de détresse spirituelle, morale et sexuelle et que beaucoup de
catholiques ont de la peine à suivre cet idéal, tout comme la majorité
des membres de la société. Il importe donc de rappeler le devoir de ne
pas donner la mort. Si des personnes ne vivent pas la fidélité et
s’installent dans une situation de multiples partenariats sexuels, même
si un seul membre du couple ne vit pas la fidélité, il appartient aux
partenaires de tirer les conséquences et de prendre, sous leur
responsabilité, l’utilisation du préservatif. Mais l’Eglise ne dira
pas de manière abrupte « Prenez le préservatif ». Pourquoi ?
Si l’Eglise tenait ce langage, elle serait à côté de sa mission
puisqu’elle ouvrirait automatiquement la porte au défoulement sexuel et
à sa bénédiction. Il faut dépasser le langage simpliste du permis et
du défendu. Ce n’est pas l’objet du préservatif qu’il faut ou bénir
ou diaboliser. Il faut engendrer des comportements responsables avec les
moyens appropriés selon telle ou telle situation. L’Église catholique
propose un idéal, le rappelle et essaie de tout faire pour que les gens
soient responsables en essayant d’atteindre l’optimum. Nous pensons
surtout à la mission des familles qui doivent élever leurs enfants. Les
familles sont déstructurées et broyées par le climat de permissivité
qui se développe tandis que les conseils donnés publiquement en matière
de sexualité vont, trop souvent, à l’encontre d’une éducation
humaine. Actuellement, dans nos paroisses et sur l’ensemble du diocèse,
nous faisons porter nos efforts sur la lutte contre la polytoxicomanie. Le
mois dernier (12 octobre), nous avons organisé un colloque en
multi-partenariats sur le sujet... et l’action continue. Il y a une
dizaine d’années, nous avions deux prêtres qui ont développé un
effort particulier concernant la prévention contre le Sida et le Sida,
dont notre regretté André Lendger décédé. Ce que nous avions dégagé
à l’époque comme lignes d’actions est toujours valable pour
l’ensemble du diocèse. Sans doute, faudrait-il relancer une campagne en
multi-partenariats en tenant compte de ce que nous avions déjà fait et
de la philosophie qui est la nôtre : Il y a une dimension
spirituelle et éthique à la santé. C’est un bien que nous avons à gérer
nous-mêmes, nous en sommes les premiers responsables : faire gagner
la vie, ne pas donner la mort. Aider à découvrir que la satisfaction
momentanée du plaisir ne doit pas détruire les plaisirs à venir en détruisant
la vie elle-même. Nul ne réussit sa vie tout seul. S’informer et
informer sur le Sida en faisant appel aux compétences et en formant nos
animateurs auprès des jeunes. Faire comprendre que le Sida n’est pas
une maladie infamante. Il est nécessaire d’accueillir les malades du
Sida comme les autres malades : aider les membres d’une famille à
accueillir pour que les personnes concernées puissent se dire et être
soutenues. Tous les malades hétérosexuels et homosexuels méritent une
attention respectueuse et soutenue. Mettre en relation avec des groupes spécialisés
ou des associations pour que le découragement soit battu en brèche, que
l’accès au traitement soit effectivement possible et que les
traitements ne soient pas abandonnés. Inviter à se faire dépister pour
que l’ennemi soit repéré le plus tôt possible et combattu
efficacement. Enfin, il nous faut nous souvenir de la parole du Christ qui
non seulement nous demande de ne pas juger les personnes, mais de les
aimer comme on s’aime soi-même et comme lui, Jésus, nous aime :
« Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. »
Nous avons à faire progresser vers plus d’humanité et non pas à
condamner. Monseigneur
Gilbert AUBRY
(Participation
au Ve colloque VIH Océan Indien - Saint-Denis, 6 novembre 2006)